Quand on est praticien en massage, pourquoi faire le vide avant d’accueillir un client ?
Lorsqu’on est praticien en massage, et c’est valable pour toute personne qui accueille une clientèle (ou patientèle) dans l’objectif de prendre soin d’elle, il est nécessaire de prendre du recul vis-à-vis de soi-même et de ce qu’on vit au quotidien afin :
D’éviter toute pensée qui pourrait encombrer son esprit pendant le soin et le dévier de sa pratique.
En effet, sans le vouloir, et souvent inconsciemment, nos cerveaux sont sans cesse envahis par les pensées du quotidien : le passé, le futur, la journée, l’organisation, les tâches à réaliser, les soucis familiaux ou autres… . Les praticiens, quels qu’ils soient, ne sont, évidemment pas épargnés. Mais toutes ces pensées n’ont pas leur place pendant la durée du soin. Le temps du soin est un temps totalement dédié à la personne qu’on accueille.
Le praticien laisse un maximum de place dans son esprit pour être disponible à la personne qu’il ou elle accueille.
Lorsque je masse une personne, je dédie toutes mes pensées, mon esprit, mon corps, mes cellules, mon énergie à la personne qui est là, avec moi. Si je pense, ne serait-ce que quelques minutes, au repas que je vais faire le soir ou à mes soucis du moment pendant la séance,
- Je peux ne pas réaliser que la personne que je masse n’est pas à l’aise pour diverses raisons : douleurs, chatouilles, froid, sensations diverses et n’ose pas le dire par pudeur ou pour ne pas gêner ou, encore, pour ne pas interrompre le massage. Ce sont des choses que je sens si mon esprit est totalement dédié à elle.
- Je peux avoir moi-même, des réactions liées à mes pensées qui ne seraient pas adéquates avec ma pratique.
Sur ce sujet, j’ai un exemple personnel : lors d’un massage, il y a longtemps, j’étais fatiguée et mes pensées ont pris le dessus alors que mes mains glissaient sur le corps d’une personne. M’est, tout à coup, revenu en mémoire un souvenir drôle et j’ai laissé échapper un rire d’une seconde, et cette seconde a suffit pour la personne que je massais s’en rende compte et réagisse. Je me suis, bien sûre, excusée et le massage s’est très bien passé finalement, mais j’étais très gênée de m’être laissée emporter par cette pensée qui s’était immiscée entre moi et la personne dont je prenais soin.
D’éviter un éventuel transfert d’énergies négatives ou trop fortes ou, tout au moins, en inadéquation avec les besoins de la personne qu’on accueille dans notre cabinet ou salon.
J’ai un exemple très parlant que j’ai, moi-même, vécu : Un jour que je me faisais masser, j’ai failli arrêter le massage car je sentais, dès le début, que la praticienne était stressée. Je n’ai pas osé de peur de la vexer. Je peux vous dire que j’aurais dû, car mon corps a longtemps gardé en mémoire le transfert d’énergies négatives que cette personne m’avait fait. Je me suis fait, à ce moment-là, la promesse de ne jamais faire subir cela à quiconque.
D’être capable d’amener la personne qu’on accueille au niveau de détente souhaité par celle-ci.
En effet, une personne qui vient pour profiter d’un massage, a, pour intention principale, de se détendre, de lâcher prise. Elle arrive, bien souvent, stressée, tendue et elle a besoin de poser ses valises.
Le praticien doit pouvoir capter le niveau d’énergie, de stress, de tension de la personnes qui se présente à lui ou elle, se placer en miroir face à cette énergie, se mettre à peu près au même niveau, pour amener cette énergie à doucement baisser.
Tout ce processus n’est possible que si le praticien a pris, en amont (avant la séance) conscience de son propre niveau de tension, l’a baissé et garde en mémoire la détente acquise pour la retrouver aisément en présence de la personne qu’elle ou il accueille.
D’éviter un éventuel transfert de pensées ou d’émotions.
Il est bien entendu qu’un praticien accueille chaque client en restant totalement dénué de jugement ou d’à priori, dans une écoute la plus pure et la plus ouverte possible. (petite parenthèse pour dire que les un an et demi de formation à la sophrologie m’ont beaucoup aidée à développer cette capacité d’écoute équanime (sans jugement). Elle n’est pas innée et s’apprend en accueillant, en écoutant et en prenant conscience que chacun a son vécu, son éducation, sa sensibilité et que les ressentis, perceptions, réactions, comportement et paroles de chacun découlent de tous ces paramètres que toute autre personne ne connaitra jamais complètement car personne n’a jamais vécu la même chose. Un praticien en massage reste donc ouvert à tout ce qui se présente sans laisser ses propres ressentis prendre le dessus sur ce que son client lui raconte.
Pour garder cette équanimité en toute circonstance, avant chaque massage, je me mets dans ma bulle, souffle tout ce qui peut encombre mes pensées et me rends disponible.
De préserver l’aspect exceptionnel, privilège que chaque client ou patient ressent lorsqu’il se rend à un rendez-vous pour qu’une autre personne prenne soin d’elle.
Lorsque nous décidons de prendre un rendez-vous pour qu’une autre personne prenne soin de nous, c’est une démarche exceptionnelle. Nous ressentons ce moment comme un privilège qu’on nous a offert ou que nous nous sommes offert à nous-même. Nous nous attendons à entrer dans une bulle de bien-être et que le praticien soit dédié à cet objectif.
De son côté, le praticien a peut-être déjà massé plusieurs personnes avant ce soin, il est peut-être un peu fatigué. Pourtant, il remets à chaque fois « les pendules à l’heure », il fait comme une réinitialisation, refait le vide et offre ce soin d’exception tant attendu comme s’il s’agissait du premier de la journée.
D’éviter de s’installer dans des postures inadéquates et blessantes pour soi-même.
J’ai créé un massage très en mouvement lors duquel il est nécessaire de beaucoup se déplacer autour de la table et, par conséquent, de la personne que je masse. La difficulté est de se déplacer sans s’appuyer sur la personne qu’on masse, sans lui faire sentir les déplacements. On passe de la position squatte au grand guerrier, les jambes se croisent, un pied devant, un pas en arrière… et tout cela sans interrompre le mouvement des mains, le massage reste fluide, agréable, comme une vague perpétuelle. Pendant les massages, je respire, pense à mon ancrage, mes points d’appuis, mon corps accompagne mes bras, mes mains dans les mouvements. Pour que cette harmonie fonctionne, mon esprit exerce un va et vient perpétuel entre ce que je fais (le massage) et ce que je ressens. Je dois régulièrement m’attarder sur mes ressentis pour savoir si je suis dans la bonne posture, si je me tiens bien pour que mon corps bouge dans de bonnes conditions. Si je ne fais pas cela, mon dos, mes épaule, ma nuque, mes bras, mes lombaires… peuvent se crisper et je finis la journée en compote ou raide comme un piquet.
Il est clair que cette gymnastique de l’esprit n’est possible que si je suis réellement dans le présent. Dès que mes pensées sont ailleurs, je me place mal et me fais mal.
Puis, à la fin du massage, pendant que la personne se rhabille, je fais des étirements pour démarrer la séance suivante dans les meilleures conditions. Vous pouvez être sûrs que si je ne suis pas dans le présent, j’oublie une fois sur deux de faire mes étirements.
Pour conclure
C’est une des raisons pour lesquelles j’adore ce métier, C’est, pour moi, la beauté de ce métier : Il m’oblige constamment à me recentrer, à être dans le présent, à être bien ancrée, à respirer en conscience, à puiser en moi l’énergie positive, sereine et tranquille dont j’ai besoin pour mener à bien mes soins.
